La liberté syndicale : Principe et modalités de protection  

Au Cameroun, les syndicats sont régis par la loi N°2020/009 du 20 juillet 2020 modifiant et complétant certaines dispositions de la loi N°90/053 du 19 décembre 1990 relative à la liberté d’association. Il s’agit d’un groupement constitué par des personnes exerçant une même profession ou des professions connexes ou similaires pour l’étude et la défense des droits ainsi que les intérêts matériels et moraux de leurs membres.

De manière générale, la liberté syndicale est le droit reconnu aux travailleurs et aux employeurs de s’affilier au syndicat de leur choix ou de rester en dehors de tout syndicat. Le principe de la liberté syndicale est inscrit dans le préambule de la constitution du 18 janvier 1996 et repris par l’article 3 du code du travail.

En lisant cet article jusqu’à la fin, vous serez plus édifié sur le principe de la reconnaissance de la liberté syndicale par la législation camerounaise (I) ainsi que les modalités de protection prévues (II).

I - Le principe de la liberté syndicale consacré par le législateur camerounais

Il faut distinguer ici la liberté syndicale collective de celle individuelle.

1) La liberté syndicale collective

Au Cameroun, la loi reconnait aux travailleurs et aux employeurs sans restriction d’aucune sorte et sans autorisation préalable le droit de créer librement des syndicats professionnels ayant pour objet l’étude, la défense, le développement et la protection de leurs intérêts  (Article 3  du code du travail). Le mouvement syndical est en plein essor au Cameroun car plusieurs employés sont membres d’un syndicat professionnel. Selon la Chambre de Commerce, de l’Industrie, des Mines et de l’Artisanat, le Cameroun comptait en octobre 2016 cent soixante-quatorze (174) organisations professionnelles et associations. Nous pensons que ce chiffre a certainement augmenté à ce jour.

Au niveau international, le mouvement syndical est porté par la Confédération Syndicale Internationale (CSI) crée en 2006 et basé à Genève. Les organisations affiliées à cette structure au Cameroun sont :

  • La Centrale Syndicale du Secteur Public (CPC)
  • La Confédération syndicale autonome du Cameroun (CSAC)
  • La Confédération syndicale des travailleurs du Cameroun (CSTC)
  • L’Union des syndicats libres du Cameroun (USLC)

2) La liberté syndicale individuelle

La liberté syndicale individuelle se décline sous deux formes à savoir : , la liberté d’adhérer ou de ne pas adhérer à un syndicat et la liberté de se retirer de l’organisation syndicale.

a) La liberté d’adhérer ou de ne pas adhérer à un syndicat

Aux termes  de l’article 4  du code du travail , le choix d’adhérer ou de ne pas adhérer à un syndicat professionnel appartient exclusivement au travailleur pour ce qui est des syndicats d’ouvriers et à l’entreprise lorsqu’il s’agit des syndicats patronaux.  Ainsi l’affiliation ou non du travailleur à un syndicat ne doit pas être la conséquence de pressions de la part de l’employeur ou des syndicats eux-mêmes. L’adhésion ou non d’un travailleur à une organisation professionnelle doit uniquement être animée par sa volonté individuelle de s’engager à cette organisation.

b) La liberté de se retirer de l’organisation syndicale

Le travailleur a le droit de se retirer librement du syndicat auquel il est affilié dans le but d’adhérer à un autre syndicat ou de se retirer de l’action syndicale. Les textes fondateurs des syndicats ne doivent par conséquent contenir aucune disposition restreignant ce droit ou le soumettant à une quelconque condition. Toute disposition desdits textes soumettant le retrait à une condition contraire à la liberté dont jouit le travailleur dans ce domaine est nulle.

Si le travailleur est libre de se retirer du syndicat, il convient de mentionner que le retrait d’un syndicat peut également être provoqué par le non-respect de ses statuts par l’employé. Dans cette hypothèse, une procédure de radiation est mise en œuvre conformément aux statuts.

La reconnaissance de la liberté syndicale par la législation est un fait. Le législateur ne se limite pas à la   proclamation des libertés syndicales mais également de l’organisation des modalités de sa protection.

II - Les modalités de protection de la liberté syndicale au Cameroun

Les moyens de protection de la liberté syndicale prévus par la législation  au Cameroun sont multiples. Il s’agit de l’interdiction de certains agissements principalement aux employeurs, aux syndicats, aux travailleurs et même à l’Etat.  Aussi toutes les conventions collectives applicables au Cameroun consacrent également une protection de la liberté syndicale.

1) La protection de la liberté syndicale contre l’employeur

Cette protection est consacrée par l’article 4 du code du travail qui interdit à l’employeur de tenir compte de l’appartenance ou non du travailleur lors de la prise des décisions. Il est interdit à l’employeur par exemple de licencier ou de causer un préjudice à ses employés en raison de leur affiliation ou de non affiliation à un syndicat ou de leurs participations à des activités syndicales.

2) La protection de la liberté syndicale contre les syndicats

Cette liberté syndicale s’appréhende sous un autre angle des relations entre le travailleur et le syndicat.

D’abord le travailleur est libre de s’affilier au syndicat de son choix et celui-ci ne peut rejeter sa demande d’affiliation sans motif légitime. En effet, le syndicat ne peut refuser de recevoir une adhésion des lors que celui-ci représente la profession exercée par le travailleur ou la branche d’activité à laquelle appartient ladite profession. Le syndicat ne peut non plus obliger les travailleurs à s’affilier.

Ensuite, les opinions des travailleurs affiliés doivent être prises en compte à l’intérieur du syndicat afin de permettre à ceux-ci de contribuer effectivement à la réalisation de son objet. Pour se faire leur avis doit être sollicité dans la cadre des assemblées générale ordinaires ou extraordinaires et de toute situation devant engagées le syndicat.

3) La protection de la liberté syndicale contre les travailleurs

Cette protection n’est pas prévue par le code du travail mais plutôt par les textes réglementaires. La plupart des conventions collectives ont comblé ce vide en prévoyant que les travailleurs doivent respecter la liberté de leurs collègues dans le choix du syndicat auquel ils doivent adhérer. C’est ainsi que la convention collective du commerce du 13 février 2017 dispose en son article 10 que :  << Les parties contractantes s’engagent à n’exercer aucune pression, ni contrainte sur le personnel en faveur ou à l’encontre de telle ou telle organisation syndicale >>. Dans le même sens, l’article 8 de la convention nationale collective des assurances dispose également que : << Les travailleurs s’engagent, dans ce domaine à n’exercer aucune pression, ni contrainte sur leurs collègues >>

4) La protection de la liberté syndicale contre l’Etat

Aux termes de l’article C87 de l’OIT (Organisation Internationale du Travail), les travailleurs et les employeurs ont le droit, sans autorisation préalable, de constituer des organisations syndicales de leur choix. Les autorités publiques doivent dès lors s’abstenir de toute intervention de nature à limiter le droit pour lesdites organisations  d’élaborer leurs statuts et règlements administratifs, délire librement leurs représentants, d’organiser leur gestion et leurs activités et de formuler leur programme d’action.

Aussi, l’élaboration des statuts et des règlements administratifs des organisations professionnelles, l’élection de leurs représentants et l’organisation de leur gestion incombent uniquement à celles-ci à la seule condition de se conformer aux dispositions légales et règlementaires y relatives. Ainsi l’autorité administratif ne doit pas s’immiscer dans le fonctionnement d’un syndicat. Dans un jugement N°047/DF/16 du 24 mars 2016, le tribunal administratif du littoral a annulé l’arrêté N°170/AP/C19/SAEF du 05 avril 2013 du préfet du Wouri pour excès de pouvoir. Le juge administratif dans cette affaire reprochait à l’autorité administratif son immixtion dans le processus de désignation du président d’un syndicat.

5) La consécration de l’interdiction des discriminations syndicales par les conventions collectives.

L’interdiction des discriminations syndicales est consacrée par l’ensemble des conventions collectives applicables au Cameroun. Celles -ci disposent généralement que : << les employeurs s’engagent à ne pas prendre en considération le fait d’appartenir ou non à une association ou une organisation syndicale pour arrêter leurs décisions en ce qui concerne l’embauche, la conduite ou la répartition du travail, les mesures de discipline, l’avancement ou le licenciement >> les employeurs

6) Les sanctions de la discrimination syndicales

Le code du travail condamne la violation de cette exigence en considérant comme abusif, le licenciement motivé  par des opinions du travailleur ou son appartenance ou sa non appartenance à un syndicat. Par conséquent l’employeur qui prend une décision fondée sur les opinions du travailleur ou son action syndicale s’expose à une condamnation au paiement des dommages et intérêts pour licenciement abusif , en plus d’une indemnité de préavis et de licenciement.

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