Enoncé du cas pratique
A la suite d’un cambriolage perpétré dans une entreprise commerciale de la place le 15 mars 2017 à Douala, une caissette contenant la colossale somme de 9 850 000 FCFA (neuf millions huit cent cinquante mille de francs) a été emportée par les malfrats. Cette somme provenait des ventes effectuées la veille que monsieur SOH TENE, le caissier de l’entreprise a préféré garder dans son bureau en violation d’une note de service interne qui interdit cette pratique.
Inforformé de la situation le Directeur général a déposé une plainte contre le caissier pour complicité de vol et dans le cadre des enquêtes diligentées par la gendarmerie, le caissier a été interpellé et placé en détention préventive. Le Directeur, sans attendre la suite de l’affaire a procédé au licenciement de monsieur SOH TENE trois jours après.
Le 10 juin 2017, monsieur SOH TENE a été relaxé purement et simplement. De retour dans l’entreprise pour reprendre son service, il est surpris de recevoir plutôt une lettre de licenciement. C’est alors qu’il saisit l’inspection du travail et réclame notamment :
- - Sa réintégration à son poste du travail
- - Le paiement des salaires de la période de détention
- - Les dommages et intérêts pour licenciement abusif
Problème juridique posé : L’employeur peut-il prononcer le licenciement d’un travailleur pendant la période de détention préventive de ce dernier ?
Solution du cas pratique
La détention préventive a été retenu parmi les causes de suspension du contrat de travail par l’article 32 alinéa (i) du code du travail. Monsieur SOH TENE ayant été placé en détention préventive, son contrat de travail est d’office suspendu conformément à l’article 32 du code du travail susmentionné.
En conséquence, il doit être réintégré à son poste de travail mais ne peut prétendre au paiement des salaires afférents à la période de suspension parce qu’il n’a fournit aucune prestation de service durant la période de détention et ce, en application du principe bien connu << pas de travail pas de salaire >> qui découle de l’article 61 du code du travail. Cependant monsieur SOH TENE ayant été détenu à la suite d’une plainte de son employeur déposée contre lui est en droit de solliciter le paiement des dommages et intérêts par ce dernier. Le montant des dommages et intérêts dans ce cas ne peut excéder un mois de salaire conformément à l’article 39 alinéa 5 du code du travail.
Par ailleurs, le licenciement survenu pendant la période de suspension du contrat de travail de monsieur SOH TENE est irrégulier. Son employeur aurait dû attendre la décision du tribunal pour résilier le contrat de travail pour perte de confiance car la jurisprudence estime que << les relations de travail d’employeur à employé ne peuvent être fondées que sur la confiance réciproque, la perte de confiance généralement constitutive de motif légitime de rupture du contrat de travail peut résulter des charges lourdes pesant sur le travailleur , même dans l’hypothèse où les poursuites pénales intentées contre l’intéressé se seraient terminées par une décision de non- lieu >>
En conclusion, l’employeur n’est pas fondé à licencier un travailleur pendant la période de détention préventive parce que son contrat de travail est suspendu durant cette période conformément à l’article 32 du code du travail suscité. Cependant une longue détention préventive reste, sauf preuve contraire, un motif légitime de licenciement. (Cour suprême du Cameroun, Arrêt 2/S du 20 octobre 1980).