Au Cameroun, les travailleurs en général bénéficient d’un ensemble de mesures et de garanties mises en place pour assurer leur sécurité, leur bien être et leurs droits dans leur environnement du travail. Elle englobe la prévention des risques professionnelles, la préservation de la santé mentale et physique des employés ainsi que le respect de leurs droits fondamentaux.
En plus de ces mesures, une protection particulière est prévue en faveur des femmes en raison de leur vulnérabilité. Nous vous faisons le point dans cet article des différents mécanismes légaux de protection organisés en faveur des femmes au Cameroun.
SOMMAIRE DE L’ARTICLE
- I -LA PROTECTION JURIDIQUE ET SOCIALE DE LA MATERNITE
- 1) Le droit pour les femmes enceintes de rompre le contrat de travail sans préavis, ni indemnités
- 2) Le droit au congé de maternité des femmes enceintes
- 3) Les droits de la femme enceinte pendant le congé de maternité
- 4) Le droit au repos pour allaitement
- II- LA PROTECTION DES FEMMES PAR L’AMENAGEMENT DES CONDITIONS DE TRAVAIL PLUS FAVORABLES
- 1 ) Les travaux interdits aux femmes
- 2 ) Un régime plus favorable de la durée de travail et le travail de nuit des femmes
I- La protection juridique et sociale de la maternité
Plusieurs avantages légaux sont prévus en faveur des femmes enceintes au Cameroun à savoir :
1) Le droit pour une femme enceinte de rompre son contrat de travail sans préavis, ni indemnités
La femme enceinte dont l’état de grossesse est constaté au moyen d’un certificat médical peut rompre unilatéralement le contrat de travail le liant à son employeur. Cette possibilité de mettre fin au contrat de travail n’entraine aucune conséquence pour elle. Son employeur ne peut donc prétendre ni au préavis, ni à une quelconque indemnité. Par contre si la femme enceinte peut facilement mettre un terme à son contrat de travail sans préavis, ni indemnité, il n’en est pas de même pour l’employeur. Il lui est interdit de rompre le contrat de travail le liant à la femme enceinte pour cause de grossesse (Article 84 alinéa 1 du code du travail). Tout licenciement motivé par l’état de grossesse est qualifié d’abusif et ouvre droit au dommages et intérêts.
2) Le droit au congé de maternité
Toute femme enceinte a droit à un congé de maternité qui commence obligatoirement 04 semaines avant la date présumée de l’accouchement et de termine 10 semaines après celui-ci conformément à l’article 84 du code du travail.
Au terme de l’alinéa 2 de l’article 84 du code du travail, pendant la durée du congé de maternité, l’employeur ne peut rompre le contrat de travail. Tout licenciement prononcé en violation de cette disposition peut entrainer la condamnation de l’employeur au paiement des dommages et intérêts pour licenciement abusif.
3) Les droits de la femme enceinte pendant le congé de maternité
Pendant le congé de maternité, la femme enceinte bien que ne travaillant plus (son contrat de travail étant suspendu) a droit aux prestations sociales versées par la Caisse Nationale de Prévoyance Sociale. Ces prestations sont constituées des allocations prénatales, de maternité, familiales ainsi que des indemnités journalières et les frais médicaux de grossesse et de maternité. Les conditions et les modalités de paiement des prestations sociales sont aménagées par l’arrêté N°007-MTLS-DPS du 14 avril 1970 fixant les conditions et les modalités de paiement des prestations familiales prévues par la loi N° 67 -LF-7 du 12 juin 1967 instituant un code des prestations familiales modifié par l’arrêté N°17-MEPS du 20 novembre 1973.
- Les allocations prénatales
Les allocations prénatales sont attribuées à toute femme salariée ou conjointe d’un travailleur salarié à l’occasion de chaque grossesse régulièrement déclarée à la CNPS (Art 13 de la loi n° 67-LF-7 du 12 juin 1967 instituant un code des prestations familiales suscitée). Elles sont calculées sur la base de 09 fois le taux mensuel de l’allocation familiale versée pour chaque enfant. Ce taux est fixé à 4500 francs par enfant à charge et par mois conformément à (l’article premier du décret N° 056 du 21 février 2024 portant revalorisation du montant des allocations familiales servies aux travailleurs).
Le montant des allocations prénatales est égale à 09 fois le taux mensuel de l’allocation versée pour chaque enfant : soit 4500 x 9 = 40500 FCFA
- Les allocations de maternité
L’allocation de maternité est due à toute femme salariée ou à l’épouse non salariée d’un travailleur qui donne naissance, sous contrôle médical à un enfant né viable. Il faut en outre la déclaration à l’état civil de la naissance de l’enfant dans les délais prévus et l’envoi à la CNPS d’un extrait d’acte de naissance sauf si l’enfant né viable décède avant l’expiration du délai réglementaire de la déclaration de naissance (Art 13 de l’arrêté n° 007-MTLS-DPS du 14 avril 1970 précité)
L’allocation de maternité est égale à 12 fois le montant mensuel de l’allocation familiale. Soit 4500 x 12 = 54 000 FCFA
- Les indemnités journalières
Les femmes salariées ont droit à une indemnité journalière pendant la période de suspension du contrat de travail à l’occasion de l’accouchement. Cette indemnité est versée aux femmes salariées justifiant au moment de la suspension du contrat, de 06 mois consécutifs de travail effectué chez un ou plusieurs employeurs.
L’indemnité journalière est égale à la totalité du salaire effectivement perçu par le demandeur au moment de la suspension du contrat de travail et est à la charge de la CNPS.
- Les allocations familiales
Elles s’élèvent à 4500 francs par enfant et par mois (Art 1er du décret N° 056 du 21 février 2024 portant revalorisation du montant des allocations familiales servies aux travailleurs). Elles sont payées mensuellement par la Caisse Nationale de Prévoyance Sociale.
4) Le droit à un repos pour allaitement
La situation de la femme mère reste préoccupante même après l’accouchement. Celle-ci devra effectivement prendre soin du nourrisson. Afin de trouver un juste milieu entre ses préoccupations professionnelles et les intérêts du nourrisson, le législateur a aménagé un temps de repos pour allaitement en faveur des femmes salariés mères. L’employeur est tenu conformément à l’article 85 alinéa 1 du code du travail d’accorder un temps de repos pour allaitement aux femmes salariés mère. La durée totale de ces repos ne peut dépasser une heure par journée de travail. La mère salariée bénéficie de ce repos pendant une période de 15 mois à compter de la naissance de l’enfant.
La mère salariée peut pendant cette période de repos pour allaitement rompre son contrat de travail sans préavis conformément à l’article 85 alinéa 3 du code du travail
II- La protection de la femme par l’aménagement des conditions de travail plus favorables
Au Cameroun, certains travaux ne peuvent etre confiés aux femmes. De même le législateur a prévu certains aménagements dans la durée de travail et le travail de nuit pour les femmes en raison de leur sensibilité et leur vulnérabilité.
1) Les travaux interdits aux femmes
La liste des travaux interdits aux femmes est prévue par l’arrêté d’application du code du travail N° 16/MTLS/DECRE du 27 mai 1969. Il s’agit de manière générale des travaux excédant leur force. Il est ainsi interdit d’employer les femmes aux travaux dangereux et insalubres notamment :
– Les travaux souterrains, mines, carrières et galeries.
– Les travaux de graissage, nettoyage et visite ou réparation des machines ou mécanismes en marche
– Dans les locaux contenant des machines actionnées à la main ou par un moteur, aux parties dangereuses non recouvertes par un dispositif protecteur
– Transport sur tricycle ou engins analogue à moteur ou à pédales
– Travaux sur les matières ou dans les locaux aux émanations dangereuses. Ces travaux et matières également interdits aux jeunes travailleurs sont énumérés dans une liste limitative annexée à l’arrêté n° 16 du 27 mai 1969 suscité.
Le contrôle de ces mesures est assuré par l’inspection du travail. En effet l’article 87 du code du travail donne à l’inspecteur du travail le pouvoir de requérir un examen médical pour vérifier si les tâches confiées aux femmes dans l’entreprise n’excèdent pas leur force. Si la femme est médicalement reconnu inapte à la tâche confiée après un contrôle, l’employeur est tenu de l’affecter à un autre poste.
2) Un régime plus favorable de la durée de travail et le travail de nuit des femmes
Les femmes sont des personnes sensibles et vulnérables. A ce titre le droit du travail leur accorde une protection particulière prévue par l’arrêté N°16/MTLS/DEGRE du 27 mai 1969 relatif au travail des femmes. A la lecture de ce texte, il ressort que les femmes ont droit à un repos continu d’au moins 12 heures. Ainsi le temps de repos peut être supérieur à cette durée légale. Dans tous les cas, il ne saurait être interrompu pour quelques raisons que ce soit.
En outre, le travail de nuit des femmes est interdit dans l’industrie. Toutefois cette interdiction ne s’applique pas pour les femmes qui exercent les fonctions d’encadrement ou lorsqu’elles sont occupées dans les services m’impliquant pas un travail manuel, c’est dire un travail physique
La violation des dispositions relatives au travail de nuit est sanctionnée d’une amende de 200 000 à 1500 000 francs conformément à l’article 168 alinéa 10 du code du travail. Cette sanction peut être aggravée en cas de récidive. Dans ce cas, l’employeur encourt en plus de l’amende un emprisonnement de 06 jours à 06 mois (Art 170 du code du travail)
En plus de ces sanctions pénales, la femme victime de l’infraction dispose d’une action en dommages et intérêts pour la réparation du préjudice subi en raison d’un travail de nuit ordonné en violation des dispositions y relatives.